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Le plastique, loin d’être fantastique

Par la rédaction 0 commentaires - 12/07/18

D’après la dernière étude de PlasticsEurope (fédération européenne du secteur des plastiques) sur les 3,4 millions de tonnes de déchets plastiques produits en France en 2016, deux tiers ont été valorisés (c'est-à-dire incinérés pour produire par exemple du chauffage urbain) et un tiers recyclé, soit environ 758 000 tonnes.

"Pour comprendre pourquoi, il faut se pencher sur une réalité peu connue du public : l'impossibilité de trier ou de recycler des emballages complexes ou des objets hétéroclites", relève Adeline Trégouët, rédactrice-en-chef déléguée, qui a piloté en mars dernier le hors-série Déchets du magazine 60 millions de consommateurs. "Des milliers de produits de consommation n'entrent dans aucune consigne de tri (accessoires de sport, outils, meubles de jardin…). Ces recalés du recyclage sont brûlés (lorsque la collectivité dispose d'un incinérateur) ou enfouis pour des centaines d'années (...) En dehors des bouteilles et flacons, moins de 3 % des emballages en plastique faisant l'objet d'un tri ont été au final recyclés en 2016 !". "La France a du retard. Les effets de la loi de transition énergétique votée en 2015 ne sont pas encore visibles", admet Hervé Millet, directeur des affaires techniques et réglementaires Europe de l’Ouest de PlasticsEurope.

Pour améliorer la situation, PlasticsEurope table sur la mise en oeuvre de l'extension à tout le territoire de la consigne de tri de tous les emballages plastiques et du décret «5 flux» obligeant les acteurs économiques à trier les déchets recyclables. Un accord récent au niveau européen fixe comme objectif 50% d'emballages plastiques recyclés en 2025 et 55% en 2030. Fruit de cinq mois de travaux ayant associé toutes les parties prenantes ainsi que le public via une consultation en ligne, la feuille de route pour l’économie circulaire présente un ensemble de mesures cohérentes, équilibrées et structurantes qui permettra à tous les acteurs « d’entrer dans la boucle ». Elle permet en outre à la France d’atteindre certaines cibles des objectifs du développement durable de l’Agenda 2030 des Nations unies, en particulier l'objectif « d'établir des modes de consommation et de production durables ».

Axe majeur de l’économie circulaire, la gestion des ressources pour mieux produire est un enjeu prioritaire de la feuille de route. Il s’agit avant tout de systématiser et d’inciter économiquement à l’éco-conception des produits, vecteur d’innovation et d’emplois. Elle doit aussi amener les industriels à repenser leur modèle de production en incorporant plus de matière première recyclée et biosourcée en particulier pour le plastique.

L’enjeu du plastique fait l’objet de cinq mesures spécifiques et sera indéniablement le marqueur d’un véritable changement d’échelle dans le déploiement de l’économie circulaire : la feuille de route vise à améliorer la collecte des emballages recyclables, des bouteilles en plastique et des canettes grâce au système de consigne, tandis que les industriels des secteurs du bâtiment, de l’automobile, des équipements électroniques et électriques et de l’emballage sont invités à prendre des engagements d’intégration de matières plastiques issues des déchets. Brune Poirson, secrétaire d'État auprès du ministre de la transition écologique et solidaire déplorait que "dans les grandes villes, comme Paris et Marseille, seule une bouteille en plastique sur dix est collectée".

L'idée du gouvernement est de permettre aux consommateurs de disposer du plus de points de collecte possible, et d’avoir des acteurs privés et publics pouvant assurer leur gestion. Pour mettre en place ce système, le gouvernement prend comme exemple le modèle de son voisin allemand dont les consignes sont en place depuis 2003. "L’éco-conception est le modèle de demain. Il s’agit d’un enjeu écologique et économique. Nous avons toute une filière industrielle française à développer qui créera des emplois sur nos territoires." a rappelé Brune Poirson à l’occasion de son déplacement dans les locaux de Machaon et de ThincLab à Châlons-en-Champagne.

L'industrie événementielle peut tirer son épingle du jeu en sensibilisant les donneurs d'ordre (annonceurs, exposants, organisateurs) et en proposant des solutions plus vertueuses : signalétique sans PVC, valorisation du mobilier usagé via des éco-organismes, don à des associations, stands réutilisables, limitation voire suppression des contenants et emballages en plastique …

Pour mieux comprendre l'ampleur du phénomène au niveau mondial ...

Initiée il y a seulement une soixantaine d'années, la production de masse des matières plastiques s'est accélérée à une telle vitesse qu'elle a généré 8,3 milliards de tonnes, dont la plupart sont des produits jetables qui finissent par devenir des déchets Les matières plastiques prenant plus de quatre siècles à se dégrader, la majorité d'entre elles existent toujours, même sous une forme différente. Seuls 12 % ont été incinérés. 91% des déchets plastiques ne sont pas recyclés.

Selon la première étude menée sur la question, des milliards de tonnes de plastique ont été produites au cours des dernières décennies. La majorité a fini en déchets. L'étude a démarré il y a deux ans, lorsque des scientifiques ont tenté de déterminer l'immense quantité de plastique finissant dans les mers et les dégâts qu'elle provoque chez les oiseaux, les animaux marins et les poissons. Les prévisions selon lesquelles les océans contiendront plus de déchets plastiques que de poissons d'ici à 2050, statistiques les plus mentionnées, poussent à une plus grande mobilisation.

Une nouvelle étude, publiée en juillet 2017 dans la revue scientifique Science Advances, est la première analyse à l'échelle mondiale à quantifier la totalité des matières plastiques produites, et à étudier le sort qui leur a été destiné. Sur les 8,3 milliards de tonnes métriques produites, 6,3 milliards se sont transformées en déchets plastiques. Seuls 9 % de ces déchets ont été recyclés. L'immense majorité, soit 79 %, est en train de s'amonceler sur les sites d'enfouissement des déchets ou se répand dans la nature sous forme de détritus. À un certain moment, la plupart d'entre eux finiront inéluctablement dans nos océans, sorte de dernier récipient. Si les tendances actuelles se poursuivent, 12 milliards de tonnes de plastique joncheront les centres d'enfouissement à l'horizon 2050. C'est l'équivalent de 1 188 Tour Eiffel !
Source National Géographique (novembre 2017)

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